Wednesday, December 15, 2010

Chine : en finir avec les organes pris sur les condamnés à mort



Confrontées à un grave manque de dons d’organes, les autorités chinoises ont décidé d'expérimenter un nouveau système. Ce faisant, elles révèlent que 65 % des transplantations étaient jusqu'à présent assurées par des prélèvements effectués sur des prisonniers exécutés.



Le jour même où le ministère de la Santé chinois annonçait à ses citoyens le lancement de l'expérimentation à grande échelle d'un nouveau système de dons d'organes, il révélait que 65 % des greffons provenaient à ce jour des condamnés à mort exécutés. Mais seule la presse à destination de l'étranger a révélé ce chiffre, en l'occurrence, le quotidien anglophone China Daily. C'est la première fois qu'un tel chiffre, éclairant quant à l'ampleur de la peine de mort en Chine et sur les pratiques s'y rapportant, est donné par des sources officielles. La presse en chinois s'est bornée à publier l'annonce de l'expérimentation du nouveau système, sans rapporter l'information sur l'origine des dons. Celle-ci a en revanche été largement difusée par la presse de Hong Kong.

La mise en place du nouveau système de dons d'organes a pour but d'éliminer la dépendance à l'égard du don d'organe lié aux exécutions, ainsi que de lutter contre le trafic d'organe, a précisé le China Daily. Dans une dizaine de grandes villes et de provinces, des registres de donateurs vont être mis en place par la Croix-Rouge, tandis qu'une campagne en faveur du don va être lancée et un fonds de financement constitué pour aider les patients peu fortunés. "La Chine doit mettre en place dès que possible un système de dons compatible avec sa situation nationale et avec les principes éthiques internationaux", affirme le ministre de la Santé Huang Jiefu. "Les prisonniers exécutés ne sont absolument pas une source adéquate pour la greffe d'organes", ajoute-t-il, en précisant cependant que les droits des prisonniers sont observés et qu'un consentement écrit est requis.


Selon des statistiques incomplètes, la Chine a déjà réalisé 86 800 greffes de reins, 14 643 de foie, 717 transplantation cardiaques, 165 greffes de poumons et 226 autres types de greffes, rapporte l'agence Xinhua. Mais elle n'indique pas la date initiale de ce décompte. Il semble que la multiplication de cas de trafic d'organes ainsi que la corruption entourant ces pratiques aient finalement incité les autorités à y remédier. Certains hopitaux ignorent les lois et font de gros profits sur le dos des patients. Une greffe de rein peut coûter jusqu'à 200 000 yuans [20 000 euros], le prix minimum étant, selon les experts, d'au moins la moitié. Par ailleurs, selon Chen Zhonghua, spécialiste de la greffe à l'hôpital Tongji [à Shanghai], alors que seulement 15 % des greffons étaient prélevés sur des individus vivants en 2006, cette proportion serait passée à près de 40 % aujourd'hui. "L'une des tâches cruciales du nouveau système est bien de lutter contre le trafic d'organes", rappelle le ministre de la Santé. Une macabre affaire rapportée en juin par la presse a précipité le lancement de la réforme, explique le site du magazine économique Caijing. On avait découvert dans la province du Guizhou, dans le sud-ouest du pays, le corps d'un vagabond délesté de certains de ses organes. La piste suivie par la police a mené jusqu'à un hôpital universitaire de Canton, dont un médecin faisait des allées et venues vers le Guizhou. L'enquête est encore en cours.
(extrait revue de presse reconduit)
Plus de 65% des organes greffés en Chine proviennent de prisonniers exécutés, une situation dénoncée par un haut responsable gouvernemental chargé de la santé, a rapporté mercredi le quotidien officiel en anglais China Daily.
L'article du quotidien, qui attribue ce chiffre à des experts du secteur de la santé, constitue un aveu inhabituel du rôle joué par les condamnés à mort dans le domaine des greffes en Chine. Les détenus exécutés "ne sont absolument pas une source appropriée pour des greffes d'organes", a estimé le vice-ministre chinois de la Santé Huang Jiefu, cité par le China Daily.
Afin de tenter de remédier à la "longue dépendance" du pays à l'utilisation d'organes de condamnés à morts exécutés, la Société chinoise de la Croix-Rouge a lancé mardi un système national de don d'organes, explique le quotidien. Le système devrait dans un premier temps être testé dans 10 villes de Chine. La Croix-Rouge se chargera de recevoir les dons et de mettre en place une base de données afin de les répartir selon les besoins.
"Le système est d'intérêt public et bénéficiera à tous les patients quel que soit leur statut social et leur richesse en termes d'accès et de meilleure distribution des organes" a expliqué le vice-ministre, avant d'ajouter: "Les transplantations ne devraient pas être un privilège réservé aux riches".

Selon le quotidien, citant des statistiques officielles, seulement 1% du million de personnes ayant besoin d'une transplantation en reçoivent une chaque année. Seulement 130 personnes se sont enregistrées volontairement pour donner leurs organes depuis 2003 rapporte le professeur Chen Zhongua de l'Institut de transplantations d'organes de l'Hôpital Tongji, cité par le China Daily.
Le don d'organes est dans la situation actuelle un terreau fertile pour la corruption en Chine. Les hôpitaux pratiquant des transplantations doivent en effet être en contact avec plusieurs échelons administratifs, notamment au sein du ministère de la Justice a expliqué Qian Jianmin, chef du service transplantations de l'hôpital Huashan de Shanghai. "La corruption peut intervenir à ce moment là" a-t-il précisé, avant d'ajouter que certains ignorent purement les procédures légales concernant les dons d'organes sur les prisonniers et font un gros bénéfice. Une loi a été adoptée sur la transplantation en 2007 afin de lutter contre le trafic d'organes, selon laquelle le donneur doit avoir un lien de sang, être marié ou être "lié émotionellement" au receveur, une formule sujette à interprétation.
Le système actuel pose en outre un problème en termes de répartition du coût des transplantations l'ensemble des frais étant jusqu'à présent payé par le patient ou ses proches.
La Chine exécute plus de condamnés qu'aucun autre pays au monde, au mois 1718 l'année dernière selon l'ONG Amnesty International, bien que le nombre réel de personnes exécutées soit considéré comme un secret d'Etat par Pékin.
Le prélèvement d'organes sur les condamnés à mort est vivement critiqué par de nombreuses organisations non-gouvernementales. De son côté, le groupe religieux Falungong, banni depuis 1999, dénonce le prélèvement d'organes sur ses pratiquants arrêtés en Chine.