Sunday, December 19, 2010

La dépendance affective




Lorsque nous venons au monde nous sommes dépendants de notre environnement pour survivre. Cette survie dépend non seulement de la nourriture physique, mais aussi d’une saine nourriture émotionnelle.  L’amour, la chaleur humaine, l’attention, la tendresse et la joie sont quelques-uns des ingrédients de cette nourriture émotionnelle nécessaire au développement d’une autonomie affective.  Lorsque la nourriture émotionnelle est insuffisante durant l’enfance, une personne demeure au stade de la dépendance affective qui est en fait une dépendance émotionnelle.  De nombreuses recherches ont démontré que les gens qui ont été élevés dans un environnement émotionnel positif ont une meilleure santé physique et émotionnelle que les gens qui ont grandi dans un environnement émotionnel conflictuel.

En tant qu’enfant, nous sommes entièrement dépendants de nos parents pour bâtir notre identité et notre liberté d’être.  Lorsque l’identité et la liberté d’être sont étouffées, ignorées ou rejetées, la vie d’adulte est alors profondément marquée par une absence d’estime de soi et une incapacité à gérer les émotions et les sentiments.  André a tellement souffert du manque d’amour durant son enfance qu’il est incapable d’exprimer ce qu’il ressent.  Mélanie a tellement peur de perdre dans une relation amoureuse qu’elle en devient jalouse.  Cette jalousie a causé le bris de chacune de ses relations.  Lorsque Louise tombe en amour, elle devient l’ombre de l’autre et cesse d’exister pour elle-même.

La plupart des gens, en devenant adultes, acquièrent une autonomie financière et matérielle ; cependant, combien acquièrent une autonomie affective et émotionnelle?  Beaucoup de gens sont incapables de vivre une autonomie affective.  Pourquoi ?  Parce que certaines croyances restrictives acquises durant l’enfance les en empêchent.  Ces croyances fixent les comportements. Il y a, par exemple, des gens qui ne vivent que dans leur tête et qui n’ont pas la moindre idée de ce qui se passe dans leurs sentiments et leurs émotions.  D’autres vivent une insécurité permanente et ont de nombreuses peurs et inquiétudes qui les rendent dépendants et vulnérables aux jugements des autres.  Il y a ceux et celles qui manipulent et contrôlent les autres avec des sentiments négatifs pour être aimés.

Une personne qui souffre de dépendance affective croit que l’amour ne peut provenir que des autres.  Puisqu’elle ne s’aime pas, elle a de la difficulté à apprécier l’amour qu’elle reçoit.  Elle est comme une chaudière avec des trous dans le fond.  On a beau y verser de l’eau, la chaudière ne se remplit jamais.  Le dépendant affectif, même s’il est aimé, ressent un vide causé par la difficulté à s’aimer et à reconnaître sa propre valeur.  Puisque les sentiments et les émotions ne peuvent provenir que des autres, il doit contrôler les autres afin d’être aimé.  Ce contrôle peut s’exercer par la culpabilisation, la critique, le blâme, la colère, mais aussi par l’impuissance, la peur de perdre, les malaises et la maladie.  Le contrôle excessif est responsable de la majorité des problèmes dans les relations de couple, les relations parents/enfants et les relations patron/employés.





Une des manifestations les plus dramatiques des effets de la dépendance affective est l’alcoolisme et la toxicomanie.  Les recherches ont démontré que l’alcool et les drogues produisent de la dopamine, un neurotransmetteur, qui joue un rôle clef dans la sensation du plaisir.  Les alcooliques et les toxicomanes recherchent par l’alcool et les drogues des sentiments positifs qu’ils n’ont pas reçus durant leur enfance.  Cependant, le prix à payer en souffrance physique et émotionnelle dépasse largement le montant de plaisir éphémère que les substances chimiques peuvent procurer.

Pour devenir autonome sur le plan affectif, il est tout d’abord nécessaire d’acquérir une indépendance affective.  L’indépendance affective est cet état dans lequel une personne a suffisamment d’amour d’elle-même pour ne plus être dépendante de l’amour des autres.  La personne qui a acquis une indépendance émotionnelle connaît d’autres outils que l’alcool et les drogues pour se sentir bien en elle-même.  Cette indépendance affective lui permet de ne plus être dérangée par les jugements et les opinions erronés que les autres pourraient avoir à son sujet.  Elle sait que sa perception d’elle-même est plus importante et réelle que les perceptions que les autres peuvent avoir d’elle.  Elle sait faire la différence entre une critique constructive d’une critique stupide.  Elle se sent libre d’être elle-même et responsable de son propre bonheur.






La dépendance affective n'est pas un malaise qui se déclare ouvertement du jour au lendemain. Elle s’installe dans notre quotidien, au rythme des contraintes, des doutes et des causes d'insécurité. Il existe cependant des indices qui vous mettront la puce à l'oreille, des comportements de dépendance qui devraient vous inciter à réviser la dynamique de votre relation.  C’est un problème qui se retrouve aussi bien chez les hommes que chez les femmes.


Le besoin de contact constant : Le téléphone est votre meilleur ami ! Ceux et celles qui souffrent de 
dépendance affective ont besoin de rester en communication presque constante avec l'objet de leur 
obsession. Et s'il leur est impossible de le rejoindre, ils ne peuvent plus fonctionner. C'est la panique ! 


Tout ou rien : C'est l'amour fou, la plus grande passion. Mais dès que quelque chose cloche, c'est la 
catastrophe ! On se dit prêt à opter pour la rupture à la moindre provocation. C'est l'état d'alerte. La 
relation devient souvent tellement tendue et misérable que la fin est presque souhaitable. 


Vivre à travers l'autre : Un des symptômes les plus évidents est un manque flagrant d'intérêt pour sa 
propre vie. Soudainement, tout ce qui importe, c'est l'autre. Celui qui souffre de dépendance affective 
vit donc la vie de son partenaire, par intérim, et c'est pourquoi sa relation devient si primordiale. 


Acheter le privilège d'être aimée : La plupart des personnes qui se retrouvent dans ces relations de 
force sont des personnes amoureuses en manque de pratique. Après plusieurs années de célibat, on en 
vient à croire qu'on ne sera plus jamais aimé. Quand le sauveur se présente, on est prêt à payer le prix 
de son amour. 


S’effacer pour laisser toute la place à l’autre : La dépendance affective se manifeste également par 
un besoin de s'effacer, de ne pas nuire ou de déranger. Cela découle évidemment de l'idolâtrie de 
l'autre, et du désir profond de ne pas entrer en compétition avec l’autre.


Au diable, la dignité : C'est fou comme on se libère de toutes nos inhibitions lorsque l'intégrité du 
couple est en jeu ! On n'hésite pas à recourir aux larmes, aux cris, aux menaces, à la crise en bonne et 
due forme, bref aux pires bassesses pour attacher l'autre, pour garantir sa fidélité ou tout simplement sa 
disponibilité. On ne récolte rien de bon en agissant de la sorte. 


L'énergie du désespoir : C'est inouï comme on se trouve des ressources lorsqu'on est prise de panique 
amoureuse ! Si l'imagination est souvent la cause de nos conflits, elle est aussi très fertile pour trouver 
des stratégies d'attaque ou de défense. On invente les plus habiles scénarios pour séduire l'autre, pour
s'assurer de sa présence lors d'une soirée ou pour le convaincre de nous suivre. 



Le dévouement acharné : Elle ferait n'importe quoi pour lui et vice versa. Des personnes ont même 
abandonné tout ce qu'elles avaient de plus important (notamment la famille et les ami(e)s) pour ne pas 
déplaire à leur nouvelle conquête. Elles l'ont fait avec plaisir jusqu'au jour où elles ont constaté qu'elles 
avaient fait tout ça pour rien. 


Le phénomène d'isolement : Tout bon rapport de dépendance implique un certain niveau d'isolement. 
Et c'est le sujet dépendant qui provoque ce retrait du monde. Pourquoi ? D'abord pour protéger son 
illusion de bonheur, pour se rendre encore plus indispensable à l'autre et surtout pour ne pas lui laisser 
l'opportunité de trouver mieux et de s'évader. 


Aimer pour deux : Même confrontée à l'infidélité, au flagrant désintéressement de l'autre, elle 
demeure convaincue que la relation est possible, qu'elle l'aime assez pour deux et qu'il apprendra à 
l'aimer. Elle s'accroche désespérément à de futiles indices de tendresse et réussit à se convaincre que les 
choses rentreront dans l'ordre. 


Dépendance affective ou difficultés passagères?
Nous vivons toutes, à l'occasion, ces situations difficiles. Malgré notre bon sens et notre instinct de 
survie, nous nous laissons volontiers berner par cet inépuisable besoin d'aimer et d'être aimée.


 Si vous reconnaissez dans ces situations hypothétiques vos comportements, cela ne veut pas dire que vous 
vivez une relation pathologique. Il y a des moments de malaise et de tension dans toutes les vies de 
couples et l'insécurité fondamentale que nous vivons nous inspire parfois les plus étranges 
comportements. Mais si plusieurs de ces points vous semblent familiers, si vous êtes inconfortable ou 
carrément malheureuse dans cette histoire, sachez que le simple fait d'en prendre conscience constitue 
un pas dans la bonne direction. 



Que faire?
Pour s'en sortir, il suffit souvent d'expérimenter la liberté, de se détacher de cette situation qui nous tient en otage, de cette dépendance qui nous garde prisonnière de notre propre gré. Plutôt que de voir dans cette démarche la fin d'une aventure, faites-en le début d'une nouvelle vie pour vous, et pour vous deux. En apprivoisant ainsi la liberté, vous réapprendrez à respirer votre propre air. Et si votre 
démarche devait entraîner la fin de votre couple, dites-vous que vous n'avez fait qu'accélérer un 
processus qui était déjà bien amorcé. Et vous vous êtes ainsi épargné des montagnes de petites 
frustrations et de grands chagrins. Et la prochaine fois, vous serez plus attentive à la qualité de cette vie 
à deux... que vous serez vraiment deux à vivre !